Dimanche 21 juillet

Connaissez-vous Sazos ? Oui ? Bien ! Vraiment ? Oui ? Très Bien ! Mais le connaissez-vous dans ses plus petits détails ? C’était le défi qui était proposé aux jeunes, à leurs animateurs et à Pascal. Thierry avait arpenté le village toute la matinée, pour dénicher la petite décoration, la fleur remarquable, la date inscrite sur le linteau de porte qui en fait la plus vieille maison du village, enfin bref, vingt-trois petits points d’intérêt bien cachés, qui nécessitent de savoir lever la tête ou bien porter le regard au ras du sol pour les dénicher.
Pour corser le tout, les quatre équipes devaient deviner ce qui était à découvrir, en déchiffrant les vingt-trois anagrammes, rébus et énigmes correspondants.
Armées chacune d’un appareil photo, elles disposaient de deux heures (et pas une seconde de plus), pour immortaliser leurs découvertes et revenir à la Grange, lestées de leur précieux fardeau numérique.
Le Règlement était formel :
– Interdiction de consulter internet (tentation démoniaque pour tout animateur, pour qui le téléphone 4G est le prolongement naturel de la main).
– Obligation de rester groupés et interdiction de courir : même si la circulation dans Sazos permet de laisser les équipes circuler en toute sécurité, il faut néanmoins rester attentifs aux autres usagers (mais comme il n’y a que deux centimètres entre leurs rétroviseurs et les deux murs qui encadrent les rues, les rares automobilistes ont bizarrement tendance à circuler à allure modérée).
Au bout de une heure et cinquante-deux minutes, toute la troupe débarquait à la Grange, chacune des quatre équipes ayant mis en boîte ses vingt-trois photographies.
Le jury souverain n’avait plus qu’à contrôler la justesse des déductions des reporters. Et le verdict tombait : une équipe avait vingt-deux photographies exactes, les trois autres vingt-et-une.
Une tragédie classique doit répondre à la règle des trois unités : de lieu, de temps et d’action. Notre Grand Jeu y répondait lui aussi. Mais la tragédie est encore plus belle si un coup de théâtre en épice le déroulement. Et question coup de théâtre, le meilleur restait à venir : alors que toute la vallée résonnait des glapissements extatiques des vainqueurs présumés, les trois autres équipes, redécouvrant le concept de solidarité qu’elles avaient largement laissé de côté durant l’épreuve, créaient un collectif qui déposait, dans un rugissement courroucé, une réclamation officielle visant à faire disqualifier ceux qu’ils qualifiaient d’usurpateurs, ou à tout le moins de leur faire annuler une de leurs photographies.
En effet, s’ils n’avaient pas consulté internet, ils avaient (comme ils en avaient le droit le plus absolu) interrogé un couple d’autochtones septuagénaires alanguis sur leur transat, qui s’amusaient à voir passer en tous sens ces groupes surexcités. L’autochtone septuagénaire, bien qu’ayant une connaissance innée de la topographie de sa ville, n’a pas réponse à tout. Mais il vit une époque moderne : quand il ne sait pas, il consulte internet…
D’où le litige à trancher pour le jury, en comparaison duquel le noeud gordien n’était qu’un aimable passe-temps pour marin désoeuvré : l’équipe avait-elle enfreint le Règlement ? Certes, elle n’avait pas elle-même consulté internet, mais si la lettre de la Loi n’avait pas été transgressée, son esprit avait été foulé aux pieds, en chaussures de montagne qui plus est…
Après avoir relu en détail les Catilinaires et les discours de Caton le Grand, qui ne furent pas d’ailleurs d’un grand secours, celui-ci voulant absolument que Carthage fut détruite, ce qui n’a qu’un lointain rapport avec l’objet du litige, le jury souverain a conclu :
– Attendu que la préméditation ne peut être retenue, la probabilité de croiser un couple d’autochtones septuagénaires geeks dans Sazos étant proche de zéro;
– Attendu que l’équipe n’a pas sollicité cette consultation sur internet, et que celle-ci s’est faite hors de sa volonté;
En conséquence, les mandants sont déboutés de toutes leurs réclamations, la photographie est déclarée valide, le score de vingt-deux sur vingt-trois est confirmé, et, par conséquent, le classement provisoire est maintenant définitif.
La remise des lots aura lieu après le cauchemar diététique qui tient lieu de repas (nuggets de poulet, hamburger maison, frites au four, glace) et avant le démarrage de la boum qui va enflammer Bayen jusqu’au bout de la nuit étoilée…

Ainsi s’achève cette chronique de notre camp 2019. Vous allez retrouver vos enfants, comme ils étaient le 15 au matin, et pourtant changés par ce séjour qui, nous l’espérons, les a enchantés. A demain à la gare de Saint Médard : le train arrive à 17h54…

Samedi 20 juillet

Avant de vous conter l’épopée de notre étape du Tour de France, il nous faut solder le contentieux qui nous oppose à France Télévisions. Faut-il pour cela écrire un pamphlet à la Zola, distiller un libelle à l’ironie mordante façon Canard Enchaîné ? En tout cas, il est hors de question de jouer l’indifférence et de faire comme si rien ne s’était passé…
Si vous étiez devant votre petit écran cet après-midi, vous pouviez suivre la progression des coureurs, qui, après avoir gravi le Soulor, plongé sur Aucun et Pierrefitte, avalé les gorges du même nom, arrivaient au lieu-dit « Larrize » et passaient devant la passerelle qui franchit le gave pour monter à Saligos. La tension montait d’un cran, les coureurs devenaient nerveux, et chacun voulait briller et « montrer le maillot ». Dame, ils allaient passer devant nous et notre banderole « Bayen », confectionnée avec amour toute la matinée. La clameur de notre troupe, les encouragements pour chacun d’entre eux (avec quand même une mention spéciale pour notre ami Julian), constituaient, sans aucun doute possible, LE temps fort de cette édition du centenaire du Maillot Jaune.
C’est alors que cette télévision qui se targue d’être publique (dans le sens de Service Public, outrecuide-t-elle…) décida de lancer un de ces ineptes tunnels de publicité pour des bagnoles, des déodorants et des rasoirs, mettant en scène des bellâtres analphabètes nourris depuis leur plus tendre enfance de stéroïdes anabolisants, débitant des messages dignes de la philosophie existentielle des Pieds Nickelés.
C’est petit et mesquin, c’est une censure honteusement camouflée en adoration du Veau d’Or, alors que vous, les parents, mais aussi le Pays tout entier, attendiez pour nous voir à l’écran…
Mais ils auront beau faire, ces tristes sires, nous n’installerons pas de télévision à Bayen, et il ferait beau voir que nous les engraissions avec notre redevance… Nous conserverons nos veillées !!!
Mais soyons dignes dans l’indignation, et laissons-les se précipiter eux-même dans les poubelles de l’Histoire, qui nous rendra Justice et reconnaîtra que l’étape (certains disent le Tour) s’est jouée ici, grâce à nos cris de liesse, qui ont mis Thibault et Julian en transes, leur insufflant l’énergie qui les a propulsé dix-neuf kilomètres plus haut, vainqueurs…
Le Président de la République, présent sur la course, dans la voiture de Christian Prudhomme, ne s’y est d’ailleurs pas trompé et s’est montré impressionné par cet enthousiasme communicatif de nos Bayennais…
Mais restons simples : pour nous ce fut une belle journée, comme nous en vivons tant à la Grange : descente à la passerelle à pied, par le chemin de Saligos, pique-nique suivi de jeux dans un pré bordé par le gave, à l’ombre de grand arbres.
Lorsque la caravane publicitaire est arrivée, nous nous sommes retrouvés en toute sécurité derrière le muret qui nous séparait de la route, et là, la moisson de casquettes, maillots, gâteaux, saucissons, lessive et porte-clés s’est avérée plus que fructueuse : chacun va revenir avec ses gadgets, en souvenir de la journée.
Ne manquaient plus que les coureurs et la télé, mais vous avez noté que le sujet a déjà été évoqué quelques lignes auparavant…
Enfin, l’essentiel est que tout le monde ait passé une belle journée, et se soit bien préparé au Grand Jeu de demain, qui vous sera narré ici même… Bonne soirée et, pour vous consoler, dites-vous que passer à la télé n’est pas une finalité dans la vie.

Vendredi 19 juillet

Connaissez-vous le Lac de Gaube ? Un coin des Pyrénées admirable, perché à 1725m… et qu’il faut mériter. On ne parle pas bien entendu de ceux qui trichent et empruntent le télésiège.
Non, pour en profiter pleinement, il faut partir du Pont d’Espagne, à 1400m, et se faire la montée via le GR10. Bien sûr, ça tire un peu sur les pattes, surtout au début, bien raide, mais quel plaisir quand on arrive là-haut. Un pique-nique montagnard (saucisse sèche, jambon de pays) avec le Vignemale en tapisserie, sous un ciel radieux, et on se dit que la vie est belle ! Et nos jeunes Bayennais n’ont pas été les derniers à se le dire…
Le camp passe à une vitesse météoritique : désolés, chers parents, mais on a guère le temps de penser à vous (mais, non, ce n’est même pas vrai, les cartes postales sont déjà entre les mains du facteur…), tant on enchaîne les activités.
Demain par exemple,… Mille excuses, le téléphone sonne…
« Allo, Julian ? Félicitations pour ton Maillot Jaune et ton contre-la -montre ! Alors, tu viens nous voir demain à la Grange ? Comment, avec tes copains, vous êtes 160 ? Ça fait beaucoup… Le mieux, c’est que nous descendions te voir passer… Ne t’en fais pas : si tu ne vas pas à Bayen, Bayen ira-t-à-toi… Allez, à demain, couche-toi tôt pour récupérer… Nous, ce soir, c’est la fête, on a repas et veillée dehors, autour du feu, avec chamallows grillés et tout le toutime… Bisous… ».
Bon, comme vous avez écouté la conversation, vous savez tout… A demain pour vous aussi… On pense à vous quand même, allez…
PS : soyez devant votre télé à 16h30, vous nous verrez peut-être…

Jeudi 18 juillet

L’accrobranche, ça fout les pétoches, mais c’est trop génial !
Et oui, le vide sous les pieds, ce n’est pas normal pour notre cerveau de bipède terrien. Mais foncer dans l’espace, suspendu à son harnais, tout le long de la tyrolienne, c’est un frisson délicieux…
Cet après-midi, ce fut cinéma, car ici, la température est agréable pour crapahuter, mais pour se baigner à la piscine, c’était un peu léger…
Le film « Manou ou l’école des Goélands » a enchanté petits et grands : un petit martinet, orphelin, est adopté par un couple de goélands. Mais le peuple des goélands est hostile à ce changement, et Manou est contraint de repartir vers les siens. Les grands oiseaux, eux, se préparent pour leur migration. Horreur, un cyclone se dirige droit vers eux, qui ne se doutent de rien. Mais les martinets le ressentent, d’instinct. Manou refuse que les goélands soient exterminés : il convainc les martinets, qui foncent droit dans la tourmente, rattrapent les goélands, et les évacuent par l’oeil du cyclone…
Ces deux peuples, d’hostiles, deviennent amis, grâce à la persévérance de Manou…
A Bayen non plus, nous ne sommes pas tous pareils, mais de parfaits inconnus y deviennent aussi des amis : près de cinquante ans que cela dure…
Demain, grande balade au Lac de Gaube. La troupe est prête, le moral est au beau fixe, la météo s’annonce splendide. Même chaîne, même heure pour des nouvelles fraîches…

Mercredi 17 juillet

La Capoumobile est venue chercher les enfants ce matin à 9h30, direction le Parc Animalier des Pyrénées, autrefois connu sous le vocable de Colline aux Marmottes, et qui fêtait ses 20 ans aujourd’hui. Le bestiaire s’est considérablement étoffé au fil des ans, d’où le changement de nom, mais le lieu et l’accueil restent toujours aussi sympathiques, et une journée n’est pas de trop pour tout découvrir.
Surtout que les enfants ont choisi le parcours « physique », qui les a tout de même fait marcher 8 kilomètres à flanc de montagne, d’enclos en enclos.
Mais les Bayennnais sont pleins de ressources, ils se sont joué des chèvres, de la pente et des énigmes, toutes redoutables, pour triompher. Et se voir remettre à chacun un Diplôme Officiel de Pisteur pour leurs remarquables connaissances sur la faune sauvage !
Après une bonne douche réparatrice, et le repas qui ne le sera pas moins, une terrifiante Veillée Loup-Garou attend les intrépides…
Demain, accrobranche et, selon la météo, piscine ou cinéma… pour les survivants…

Mardi 16 juillet

Après une première veillée et les hommages rendus au Grand Fakir, tout le monde est allé se coucher. Une nuit réparatrice, un petit déjeuner roboratif, et tous ont chaussé les croquenots de montagne, préparé le sac à dos : en route vers l’aventure…
Mais nous avons affaire à une troupe de marcheurs émérites : la balade fut couverte en en temps record, malgré la pause déjeuner dans un petit chemin ombragé… Retour à la Grange à 15 heures !
Et là, surprise : en voulant installer un boîtier dans les toilettes, il s’est trouvé bêtement qu’un tuyau d’eau, que cet imbécile d’architecte n’avait pas bien répertorié dans les plans, était sur la trajectoire de la mèche de la perceuse.
Nous attendons donc le plombier. S’il nous fait faux bond, nous devrons revenir aux origines de Bayen, lorsqu’on se lavait (ou pas) à la cascade du torrent. Mais c’était très très frais, et la nostalgie ne réchauffe pas…
Demain, tout le monde va voir les marmottes, les isards, les ours, les loups et tous les animaux du Parc Animalier de Pyrénées, qui fête ses 20 ans, et dans lequel, pour l’occasion, de grands jeux sont organisés.
Ça va être trop chouette…

Lundi 15 juillet

On y est ! Tout le monde est bien arrivé à la Grange, et c’est l’installation : les filles, plus nombreuses, dans les dortoirs, et le garçons sous la tente…
Puis tout le monde va aller découvrir le village de Sazos, en attendant le premier repas commun (Et le « Bona bona » pour les initiés : si vous ne faites pas partie de ce cercle hyper sélect, demandez à vos enfants à leur retour).
Demain, première balade vers la Croix de Sia…

Dimanche 14 juillet

Bonjour à toutes et tous !
Demain, nous avons rendez-vous à 10h30 à la gare de Saint Médard.
A 11h10, le train nous emmènera à Bordeaux, où nous changerons pour Lourdes.
La Capoumobile nous conduira alors à la Grange.
Rendez-vous vers 20 heures pour les premières impressions….