Lundi 7 juillet
« Comme un vol de gerfauts hors du charnier natal
Fatigués de porter leurs misères hautaines,
De Palos de Moguer, routiers et capitaines
Partaient, ivres d’un rêve héroïque et brutal.
Ils allaient conquérir le fabuleux métal
Que Cipango mûrit dans ses mines lointaines,
Et les vents alizés inclinaient leurs antennes
Aux bords mystérieux du monde Occidental.
Chaque soir, espérant des lendemains épiques,
L’azur phosphorescent de la mer des Tropiques
Enchantait leur sommeil d’un mirage doré ;
Ou, penchés à l’avant des blanches caravelles,
Ils regardaient monter en un ciel ignoré
Du fond de l’Océan des étoiles nouvelles.«
Il faut le reconnaître, José-Maria de Heredia avait du style.
Mais franchement, qui sait où se trouve Palos de Moguer ?
Nos routiers et capitaines à nous, c’est de Saint Médard d’Eyrans qu’ils partirent, non pas dans de blanches caravelles, mais dans un TER, un TGV, une Capoumobile (appellation indigène des bus), au cœur du mystérieux Pays Toy méridional.
Et c’est à pied, enivrés des senteurs des fleurs du bord du chemin, qu’ils découvrirent la Grange, eux qui, aux premières lueurs de l’aube, avaient comme les gerfauts délaissé le nid, l’œil perçant scrutant l’horizon et le jeune plumage ébouriffé dans la fraîcheur du matin…
Eux aussi eurent leur ciel ignoré, caché qu’il était par les nuages massés pour admirer de plus près cette troupe bigarrée, et qui, une fois leur curiosité satisfaite, laissèrent place à Phébus et ses rayons réconfortants face au souffle d’Eole.
Tels des conquistadors plantant le gonfanon de Sa Majesté Très Catholique sur des terres inconnues, ils établirent leurs quartiers, qui dans la tente, qui à l’ombre de la charpente plus que centenaire de la bâtisse.
Puis vint le temps de l’exploration, à la découverte du pueblo nommé Sazos, sous l’œil accueillant et bienveillant des indigènes, impressionnés par cette troupe que les anciennes légendes avaient annoncée.
Avant de découvrir des étoiles nouvelles, ils durent se confronter à une découvertes de nourritures inconnues pour certains d’entre eux, mais auxquelles ils firent honneur, car comment être héroïque le ventre vide ?
Eux aussi espèrent des lendemains qui seront à coup sûr épiques, et, après la veillée où ils mûriront leurs rêves que Cipango et ses mines lointaines ne sauraient égaler, c’est le torrent qui dévale les pentes abruptes des montagnes qui enchantera leur sommeil d’un mirage doré…
Mardi 8 juillet
Pour les Hautes-Pyrénées, les seuils de canicule sont à 34° la journée et 19° la nuit. Je tiens à rassurer illico les parents : hier, les risques étaient très maîtrisés. Le mercure affichait péniblement les 20° au plus fort de l’après-midi, et ce matin (de bonne heure, certes), il faisait des efforts désespérés pour lâcher les 8° et foncer vers 9°. Autant dire que pour ceux qui dormaient sous la tente, s’extirper du duvet demandait une belle dose d’héroïsme. Tous avaient reçu en dotation une couverture à ajouter à leur équipement, et ce soir, pour prévenir toute récrimination, une seconde a été ajoutée. Cela est plus psychologique qu’autre chose, car on ne devait pas descendre sous les 11° au plus froid de la nuit. Tant mieux, car Sylviane et moi avons investi dans une tente « Dark & Fresh » de chez Décathlon. Je peux vous assurer que si pour le Dark, ils ont encore une marge de progression, pour le Fresh, ils sont au point…
C’était donc la première nuit sans les parents à la Grange (sauf pour le malheureux Martial, qui se goinfre sa mère, sa grand-mère et son grand-père : la cata absolue). Autant vous dire qu’on en avait, des choses à se raconter, surtout au moment de dormir. Ce n’est pas facile de se coucher en silence lorsque les fous rires secouent tout le dortoir. Une petite soif, un petit stage aux toilettes, tout est prétexte à se lever et à glousser, au grand dam des animateurs, qui ont dû user de patience, de diplomatie, et même d’autorité (?). Mais tout le monde a fini par dormir, parce que le lever avait eu lieu dès potron-minet et que le marchand de sable avait généreusement distribué sa camelote…
Du coup, ce matin, le réveil était échelonné, histoire d’éviter les petits yeux.
Une fois le petit déjeuner englouti, plusieurs ateliers étaient proposés, à la carte : peinture sur galet du gave, pâtisserie, aquarelle et jeux sportifs…
Demain, balade au Pont d’Espagne et vallée du Marcadau : ça va chauffer les petits mollets ! En attendant, veillée Times Up…
Mais pour vous raconter cet après-midi, je passe la plume à un vrai spécialiste…
« Ola, abrazo a todos ! Yé mé présente : Don Felipe Ignacio Bolivar Santiago de Guanaco y Vigogna, marquès de Cuzco y Machu Pichu. Mais yé suis resté très abordable : mes amigos du Païs Toy m’appellent Calou El Lama. Avec mes compañeros et Gilles, notre hôte, nous emmenons les enfants pour des balades en montagne. Ils aiment marcher à nos côtés, admirant notre fourrure si douce, notre pied si sûr…
Yé voudrais tout de suite dissiper un malentendu que Tintin et le Capitaine Haddock ont répandu : nous ne crachons pas sur les gens, du moins pas sans bonne raison. Il peut néanmoins nous arriver d’éternuer sans préavis. Mais songez que les microbes des Pyrénées ne sont pas les mêmes que leurs cousins des Andes, et qu’ils en profitent pour nous enrhumer dès que nous dormons sans chaussette…
Le lama est doux et coopératif, rien à voir avec les ânes. Yé le disais à Ferdinand, le baudet du voisin : ‘Amigo, tu es têtu como un burro !’.
Le lama marche au rythme de son chef, et le chef, c’est moi : Calou El Jefe. Si un compañero s’arrête pour brouter une herbe tendre ou une fleur odorante, il me suffit de dire ‘Vamos, muchachos’ d’un simple battement d’oreille, et tout le monde repart gentiment.
Nous sommes toujours accompagnés par Gilles, qui profite de ses talents de conteur pour raconter l’histoire de deux amigos qui ont rejoint la Pachamama, mais qui cheminent toujours au côté du troisième. Le premier s’appelait Névé, c’était un lama. Le deuxième Pierrot, un humain. Et le troisième, Nawal (‘le magicien’ en quecha), un lama, est un des mes fidèles compañeros.
Figurez-vous que Névé était un ressuscité. Lorsqu’il est né, dans les Alpes (c’était un pyrénéen d’adoption), il y a eu un coup de gel terrible dans la nuit. Quand Gilles est arrivé, à l’aube de ce premier mai, Névé était mort de froid. Mais l’amigo Pierrot, qui accompagnait Gilles, n’a pu se résoudre à voir ce petit lama mort avant même d’avoir vécu. Ils l’ont ramené au chalet, et Pierrot, brandissant son sèche-cheveux, l’a réchauffé, sans baisser les bras, pendant de longues minutes, qui ont fini par se transformer en heure. Et là, Névé à ouvert un oeil… Pierrot l’avait sauvé, contre toute attente. Le vétérinaire affirme que s’il avait fait moins froid, Névé serait mort. Mais là, son organisme s’était mis en hypothermie profonde, sans que son cerveau ne soit détruit par le manque d’oxygène.
Pierrot avait montré qu’il était digne d’être un Inca…
Mais même les Incas doivent rejoindre la Pachamama un jour. Et lorsque la santé de Pierrot s’est dégradée, laissant présager le pire, la mama de Nawal devait mettre son petit au monde. Mais les esprits de Pierrot et de Nawal étaient voués à se rencontrer. Ainsi, Nawal est né avec trois semaines de retard sur le terme, le jour où Pierrot nous quittait. Le magicien, El Mago, Nawal, … : tel est son nom.
Vous auriez vu les yeux de vos enfants quand Gilles racontait : ils étaient dans le pré où est né Névé, ils découvraient le petit lama mort, ils aidaient le sèche-cheveux de Pierrot de leur souffle, ils exultaient quand ils voyaient enfin, au bout de tous ces efforts, un regard filtrer à travers les paupières du bébé, né pour la seconde fois en quelques heures… Ils s’émerveillaient de la constance de Nawal à attendre pour souhaiter bonne route vers les étoiles à Pierrot et le regardaient avec de grands yeux écarquillés et pleins d’admiration.
Ce fut une belle après-midi, sous le vol des vautours au-dessus du Pibeste. Il ne manquait qu’une flûte andine, une quena, pour jouer ‘El Condor pasa’ et nous transporter chez moi, au fabuleux Pérou…
Hasta la vista, amigos… »
Mercredi 9 juillet
« Avancer la jambe gauche. Poser le pied. Avancer la jambe droite. Poser le pied. Gauche. Droite. Gauche. Droite. Ne pas penser à autre chose… Oublier le vent glacial qui hurle dans mes oreilles ‘Va-t-en ! Tu n’as pas ta place ici ! Fiche le camp !…’ Droite. Gauche. Ne pas regarder tout là-haut, ne pas regarder les nuages qui viennent se déchirer sur les sommets qui paraissent si proches et pourtant si inatteignables. Gauche. Droite. Ne pas penser à l’oxygène qui manque, au cœur qui s’emballe, aux poumons qui brûlent… Droite. Gauche. Je n’en peux plus. Ne pas s’arrêter. Ne pas céder au froid qui me ferait m’endormir à tout jamais. Gauche. Droite. Ne pas regarder en bas. Bien rester sur l’arête, ignorer le vide qui, de chaque côté, m’appelle et tente de m’attirer, pour que je rejoigne tous ceux que le glacier a avalés et qu’il vomira dans quelques siècles… Avancer la jambe droite. Poser le pied. Avancer la jambe gauche. Poser le pied. Mais que c’est dur ! Mais que c’est dur ! Allez ! Encore ! Bon sang ! Ça y est ! J’y suis ! Sir Edmond Hillary, serviteur ! Le soleil vient éclairer la pointe aigüe sur laquelle je me trouve. Je crois même entendre la douce voix de la Déesse des Sommets qui me parle… ».
« Une légère brise souffle le long de la Vallée du Marcadau, amenant avec elle les bergers et les marchands venus d’Espagne. Ils ont passé le col et m’attendent en devisant avec nos pâtres venus de Cauterets. Moi, j’ai quitté Sainte Marie de Campan il y a quelques jours, sur mon vaillant petit cheval noir, mes deux mules à la bride, chargées de tabac et de sel. Déjouer les gabelous de Luz, les semer dans la montagne que je parcours depuis ma plus tendre enfance, passer par Bayen pour rejoindre Cauterets par le col de Riou, monter jusqu’au Pont d’Espagne par le chemin des cascades. Et enfin retrouver mes clients… Ce n’est pas pour rien que ce lieu porte le nom de Marcadau. Le marché… Moi, je préfère le marché de contrebande. Rien ne m’arrête. Ni la nuit, ni la neige, ni le froid. Je suis Toy : je ne crains que Dieu, l’orage et l’avalanche. Mais qu’est-ce que cette voix qui traverse la brume ? »
« Alors, cette rando ? La montée ? Pas trop dure ? Tu dormais ? Toi aussi ? Vous aviez besoin de récupérer, dites donc ! Allez, debout… »
Lucile sonne le rappel de toute la troupe pour la pause déjeuner. Les deux qui s’étaient endormis à l’ombre, bercés par le murmure du torrent, ouvrent les yeux, tirés de doux rêves montagnards.
Durant la balade, Maxime, le guide, a raconté l’histoire de la vallée du Marcadau où se trouvent les enfants et leur équipe d’animation. Il leur a montré des Milans Royaux, des Milans Noirs, des Vautours Fauves qui planaient majestueusement dans les courants d’air chaud qui s’élancent à l’assaut de la muraille de roches jusqu’aux sommets, tout là-haut.
Avec sa lunette d’approche, il leur a fait admirer leur vol où pas un battement d’aile n’est nécessaire, tandis que leur regard perçant scrute la montagne à la recherche d’une carcasse de vache ou de mouton qu’ils s’empresseront de nettoyer, empêchant ainsi les épidémies de se déclarer.
De plus près, il leur a montré les vaches qui paissent en liberté durant toute la belle saison, faisant une orgie de fleurs d’altitude et d’herbe fraîche et tendre.
Certains les ont même vu de tellement près qu’ils en ont oublié de regarder où ils posaient les pieds. Mais marcher dans une bouse du jour, cela porte bonheur…
Bien sûr les Marmottes étaient au rendez-vous. Les petits, âgés de quelques semaines, gambadaient autour du terrier familial, sous la surveillance des parents, prêts à siffler pour rapatrier tout le monde en cas de danger.
Alors que Maxime leur montrait une photo de Bouquetin Ibérique, animal qui ignore superbement les frontières des hommes et s’aventure souvent de ce côté des Pyrénées, un Isard était là, tout proche. Trop proche : il boîtait bas, loin de sa harde qui devait se trouver bien plus haut. Sombre pronostic. C’est difficile de découvrir les dures lois de Dame Nature…
Mais cette ombre au tableau n’était pas de taille à ternir l’image d’une si belle journée. Et c’est avec des souvenirs plein la tête que tout le monde est rentré à la Grange, pour une douche réparatrice, un repas qui le sera tout autant, suivi d’une veillée qui fera oublier toutes les consoles de jeux du monde…
Jeudi 10 juillet
Qu’est-ce que le courage ?
Une légende urbaine prétend qu’un candidat au bac, découvrant ce sujet lors de l’épreuve de philosophie, aurait rendu sa feuille avec uniquement « Le courage, c’est ça ». Et que le jury, époustouflé par son audace, lui aurait mis 18 sur 20. C’est bien sûr totalement inventé, et cela n’a rien à voir avec le courage, c’est juste de la paresse intellectuelle. Et qui peut croire qu’un jury aurait pu lui mettre autre chose que la mention « A l’année prochaine » ?
Henri de la Tour d’Auvergne, vicomte de Turenne, pris de tremblements incontrôlables au moment de se jeter dans la bataille, s’était écrié : « Tu trembles, carcasse, mais tu tremblerais bien davantage si tu savais où je vais te mener ! ». Là, on se rapproche davantage du sujet : le vrai courage, ce n’est pas ignorer la peur, c’est lui imposer sa volonté, la domestiquer…
Mais si l’on veut vraiment décrire le courage, et même Le Courage, c’est dans les Pyrénées qu’il faut se précipiter, pour voir les petits Bayennais dans leur aventure du jour, l’Accro-branche.
Là, oui, il faut la vaincre, l’appréhension. Parce qu’un montagnard, c’est fait pour avoir les pieds solidement ancrés à la pente, pas pour grimper dans les arbres.
Imaginez, chers parents, imaginez que vous êtes dans votre canapé : Monsieur Eddy présente la Dernière Séance (si cela vous parle, c’est que vous avez eu vos enfants sur le tard), il vient d’annoncer le grand film de la soirée. C’est « Tarzan », avec Johnny Weissmuler. Les lumières s’éteignent, et vous voilà emportés au cœur de la jungle, à voler de liane en liane et d’arbre en arbre, à la merci de bestioles hyper agressives…
Eh bien, tout ceci, c’est de la roupie de sansonnet, de la gnognotte en branches à côté des embûches dont sont parsemées les parcours. Les noirs, certes, mais aussi les rouges, les bleus et même les verts sont des publicités pour des remèdes contre le vertige…
Et pourtant, ils l’ont fait ! Toutes ! Tous ! Ils se sont hissés sur des ponts de singe brinquebalants, sur des plates-formes étroites et glissantes, accrochées à la canopée perdue dans des brumes fétides, où sans nul doute règnent les serpents constricteurs et les araignées venimeuses. Ils se sont lancés sur des tyroliennes menaçant à tout moment de rompre, dérisoires fils d’Ariane auxquels il faut remettre son existence…
Oui, ils l’ont tous fait ! Et en riant ! En se moquant de la peur délicieuse qui leur chatouillait le ventre, et du vide qui semblait les appeler pour mieux les attirer à lui…
Evidemment, vu de Bordeaux, vous vous dites pour vous rassurer que l’histoire est un petit peu enjolivée, que Lucile n’est pas totalement inconsciente, que la chair de votre chair n’a pas pu être autant exposée à tous ces périls impitoyables, que son petit fait partie du groupe …
Certes. Mais dites-vous bien que les aventures ne deviennent des Aventures que lorsqu’on les raconte.
Quand vous voyez passer le Tour de France, vous vous dites « Bof, ce sont des gens qui pédalent, comme moi lorsque je vais chercher mon pain à vélo à la boulangerie du village ». Mais dès lors que vous lisez le compte-rendu de leurs exploits dans l’Equipe, sous la plume d’Antoine Blondin il y a trente ans ou d’Alexandre Roos aujourd’hui, lorsque vous les regardez à la télé, et que Robert Chapatte pour les plus âgés, Thomas Voeckler, Laurent Jalabert ou Marion Rousse pour les contemporains, vous les font vivre avec des superlatifs plein la musette, là, les poils de vos bras se hérissent et vous basculez dans un autre monde.
Autre exemple, plus classique, peut-être : Ulysse, qui soi-disant aurait mis dix longues années pour revenir de Troie à Ithaque. Mouais ! Sur un paquebot Costa Croisière, il suffit d’une nuit de navigation : la soirée du Commandant (avec cotillons et serpentins, buffet à volonté, champagne du Péloponnèse…), un petit dodo, et on y est…
Mais lorsque le gars Homère attrape sa lyre et vous déclame l’Odyssée (et en grec ancien, s’il vous plaît, ce qui n’est pas donné à tout le monde, notez-le bien), ce n’est plus la même musique. Polyphème le Cyclope qui se fait un marin grillé le matin au petit déjeuner, Circé la magicienne qui veut absolument transformer ceux qui restent en porcs Noirs de Bigorre, les tempêtes inouïes et les dangers tous plus dangereux les uns que les autres… Là, oui, on est dans l’épopée…
Comme vos enfants ne vous diront rien d’autre à leur retour que « C’était bien, on s’est bien amusés », ce message vous permet un peu de vivre leur courage par procuration…
Peut-être aurez vous plus de chance d’avoir un compte-rendu de leur part pour l’activité de l’après-midi : le Donjon des Aigles. Il est même possible que vos chers enfants vous ramènent des photos des rapaces qu’ils auront côtoyés.
Ils les auront même côtoyés de très près, puisque lors du spectacle, les oiseaux les ont survolés, que dis-je, survolé, ils leur ont frôlé la chevelure pour venir se poser au beau milieu d’eux. Et quand un Vautour Fauve d’une envergure de plus de trois mètres, pourvu d’un bec acéré, d’un petit œil glaçant et de griffes épouvantables vous passe à cinq centimètre de la casquette, le temps n’est plus trop à la rigolade.
Sans compter le Serpentaire qui vient prendre son goûter (un énorme serpent ultra-venimeux : le Crotale de Châaviñol. Le seul moyen d’espérer se sauver est de s’administrer l’antidote avant qu’il ne vous morde). Au beau milieu de la foule. S’il l’oiseau arrive trente secondes en retard, c’est la catastrophe en Technicolor, avec la victime du reptile qui devient toute bleue et qui convulse affreusement.
Et le Vautour Percnoptère, que l’on appelle ici la Marie-Blanque, qui vient casser la croûte, au sens propre (il prend dans son bec un caillou et qu’il lance sur un œuf d’autruche pour le briser : il a fallu installer un élevage d’autruches rien que pour lui). Imaginez qu’il se rate, et c’est un de nos aventuriers qui réceptionne la pierre avec ses oreilles…
Vous pensez s’il en fallait, du courage, pour assister à tout ceci avec le sourire aux lèvres, en traitant le danger par le mépris. Ca l’a même tellement vexé, le danger, qu’il s’est caché et qu’on ne l’a pas vu de la journée…
Au retour à la Grange, vos enfants, pour se remettre, ont eu droit à un Repas du Trappeur. Je ne vous en dis pas plus : vous demanderez à votre progéniture. Et puis, vous n’aviez qu’à venir à Bayen au lieu de vous la couler douce sans vos enfants… Sachez néanmoins qu’il semble avoir été apprécié.
Et ce soir, chamallows grillés et veillée Loup-Garous…
Vendredi 11 juillet
Panem et circenses : du pain et des jeux…
Dans la Rome antique, c’était la recette des Empereurs pour avoir le peuple de leur côté. Foin de révolte, vive la paix sociale. Lorsque les ventres sont pleins et les esprits réjouis par les courses de chevaux ou les spectacles de gladiateurs, les risques de soulèvement sont réduits à néant.
Aujourd’hui, à Bayen, la météo est assez pessimiste. Et pour demain, elle est carrément déprimée. Il nous faut par conséquent demeurer à la Grange ou dans les environs durant ces deux journées.
Pour éviter tout mouvement de foule hostile, l’Impératrice Lucilia et sa garde rapprochée, Sara, Emilia, Justinia et Valentinius ont décidé d’appliquer la bonne vieille recette.
Avec une originalité : primus : circences, secundus : panem…
En clair : ce matin, le Grand Jeu à travers Sazos, et cet après-midi, l’atelier pâtisserie…
Pour le Grand Jeu, cinq « factiones » étaient constituées : les Rouges, les Bleus, les Verts, les Jaunes et les Violets.
Le but était de cumuler des mètres de dénivelé, chaque épreuve réussie permettant d’en gagner, avec un bonus variable selon le temps mis par la « factio » pour la réaliser.
Déjà, là, il faut suivre…
Pour déterminer l’ordre de départ et récolter les premiers mètres de grimpette, il fallait se repérer sur une carte du village et trouver cinq gravures d’objets, soigneusement dissimulées. Une fois ces trésors dans la besace, les équipes se rendaient chacune sur le lieu de leur première épreuve.
Prenez des notes, ça va se compliquer…
Cinq épreuves à surmonter tout à tour :
- « Prohibitum verbum » : il faut faire deviner un mot à ses partenaires en évitant de prononcer les mot-clés formellement interdits ;
- « Turris ambulante » : il faut retirer des poutres d’une tour d’assaut en bois miniature sans la faire écrouler ;
- « Aqua sana cursus » : il faut courir avec divers récipients remplis d’eau, en en renversant le moins possible ;
- « Sine oculis cursus » : il faut courir les yeux bandés, guidé uniquement par les cris des partenaires ;
- « Lapides in circulus » : il faut lancer des boules pour les placer dans un cercle tracé au sol.
J’ai mis des noms en latin de cuisine pour faire style, au grand effroi de Caton l’Ancien, de Cicéron et de Lucile, mais je trouve que cela fait plus épique : je vous imagine cloués à votre écran, vous demandant si à chaque épreuve un membre de l’équipe la plus mal classée n’est pas précipité dans le torrent. Car vous n’ignorez pas que la Roche Tarpéienne est toute proche du Capitole…
Autant vous le dire tout de suite : tout le monde est revenu sain et sauf !
Les Violets et les Verts finissent premier ex-aequo (vous voyez, là, ce n’est pas moi qui mets du latin pour faire joli dans le paysage) avec 2 510 mètres de dénivelé cumulé.
Mais les trois autres équipes les talonnent (comme dirait Achille) de si près qu’un cas de conscience va se poser au jury…
Pour l’atelier pâtisserie, deux recettes ont été sélectionnées, qui vont sans doute nous régaler ce soir : cheese cake et cake au carambar (eh oui, je parle anglais couramment).
Pour rendre la confection de ces petites merveilles encore plus artistiques, j’ai fait appel à un cuisiner poète, j’ai nommé Ragueneau, l’ami nourricier de Cyrano.
Pressé par le temps, je dois avouer que j’ai aussi sollicité l’aide de ChatGpt pour nous aider à composer nos alexandrins de mirliton…
Pour le cheese cake, une pièce en trois actes :
« PREMIER ACTE – LA CROÛTE
(Entrent les biscuits et le beurre, en prose dansante)
Prenez deux cents grammes, dorés, croustillants,
De biscuits émiettés, finement, patiemment.
Puis versez par-dessus, tel un fleuve doré,
Quatre-vingts grammes de beurre, tout juste liquéfié.
Mélangez, tassez, dans un moule arrondi,
Et mettez au four, dix minutes — point d’ennui !
Ce sera le plancher de votre doux palais,
Une base parfumée, sur laquelle tout naît.
DEUXIÈME ACTE – LA CRÈME
(Chantent les œufs, le sucre, le fromage…)
Six cents grammes précis, d’un fromage charmant,
Philadelphia nommé, onctueux assurément.
Versez cent cinquante de sucre bien blanc,
Et trois œufs entiers, un par un, lentement.
Ajoutez une cuillère (celle de la farine),
Une autre de vanille, aux ardeurs féminines.
Puis un zeste de citron, si le cœur vous en dit,
Et deux-cents millilitres de crème au bel esprit.
Fouettez sans trop d’ardeur, point ne faut l’agiter,
Mais le tout doit former un nuage enchanté.
Le centre doit trembler, frissonner d’émotion,
Comme un cœur amoureux en quête d’une union.
Laissez-le reposer au frigo chers amis,
Le froid le raffermit, l’arôme se construit. »
Pour le cake au carambar, une pièce en quatre actes avec prologue :
PROLOGUE – L’INVOCATION DU SUCRE
« Mesdames, Messieurs, que l’on m’apporte, hâtivement,
Vingt Carambars, ces bâtons d’or fondant doucement !
Qu’ils entrent dans la danse, avec noble lenteur,
Dans cent millilitres d’un lait plein de douceur.
Et qu’avec eux s’unisse, tout fondant, tout mignon,
Cent cinquante grammes de beurre, leur compagnon.
Faites fondre le tout dans un chaudron discret,
À feu doux, en tournant en un doux menuet.
ACTE I – L’APPEL DES ŒUFS
Trois œufs d’un jaune pur, tout ronds comme la lune,
Coulent dans un saladier, sous la main opportune.
On les fouette en cadence avec sucre étincelant,
Cent cinquante grammes encore — c’est charmant !
ACTE II – FARINE ET LEVURE ENTRENT EN SCÈNE
Ajoutez la farine, en pluie noble et légère,
Cent cinquante grammes aussi, c’est l’affaire !
Puis la levure arrive, demi-sachet suffit,
Et le sel, une pincée, pour relever l’esprit.
ACTE III – MARIAGE CARAMELISÉ
Ah ! Versez maintenant, avec main inspirée,
Le mélange aux Carambars, tout juste tiédi, mêlé.
Remuez sans brutalité, tout en souplesse,
Pour que la pâte devienne une douce promesse.
ACTE IV – LA FOURNAISE
Versez dans un moule, beurré comme un prince,
Et lissez le dessus — que rien ne coince !
Enfournez à cent quatre-vingts degrés, bien chaud,
Quarante minutes, pas plus, au tempo.
Le parfum s’élève alors, conquérant, absolu,
Même mon Cyrano dirait : « Je suis vaincu… » »
C’est beau, non ? Quant à savoir si c’est bon, il faudra attendre de goûter.
Mais au vu de l’application des petits pâtissiers, je serais très étonné qu’il en soit autrement…
A demain pour le verdict…
Samedi 12 juillet
Ce matin, Magasinage (comme disent nos cousins de la Belle Province), où vos chers petits sont allés dépenser leurs sous pour acheter des merveilles de souvenirs qu’ils chériront toute leur vie.
Et cet après-midi, activités à la Grange, la météo annonçant des orages et pas mal de précipitations sur nos pauvres têtes.
Oh, je vois tout de suite le rictus moqueur se dessiner sur vos visages sarcastiques à l’évocation de l’achat de souvenirs dans les boutiques de Luz. Dans votre Ford intérieure, vous pensez « Encore des cochonneries fabriquées en Chine, semblables à toutes les autres cochonneries que l’on trouve dans toutes les boutiques du monde entier… ».
Ne niez pas, je le sais…
Sachez que vous vous trompez lourdement ! A Luz, rien de tout cela.
Tout d’abord, beaucoup d’enfants ont acheté du saucisson : ce n’est donc pas de la cochonnerie, mais de la cochonaille…
Et pour le reste, je vais vous démontrer par A + B que vous vous fourvoyez dans l’erreur la plus noire :
Depuis plusieurs années, à chaque fois que je passais devant les boutiques de souvenirs, je me faisais siffler. Pensant qu’il s’agissait de jolies femmes éblouies par ma plastique et ma démarche féline, je marchais en faisant semblant de ne rien remarquer. Pour deux excellentes raisons : la première, je ne suis pas celui que vous croyez ; la deuxième, Sylviane était toujours avec moi.
Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir, un jour où exceptionnellement j’étais seul, que c’était un troupeau de ravissantes marmottes en peluche qui me hélaient.
A partir de là, l’envie d’en avoir une à la maison, de pouvoir profiter chaque jour de sa trogne adorable et de son sifflement mutin, me taraudait toute l’année.
Je me disais : « En juillet prochain, je craque. ».
Enfin, un beau jour, je me décidai à acquérir cette boule de fourrure si douce et si représentative de nos belles montagnes. En un tournemain, l’affaire fut conclue, et, triomphant, je ramenai mon précieux butin à la Grange.
Quelle ne fut pas ma déception devant la réaction de Sylviane. Une déception horrible, pareille à celle d’une enfant qui se précipite au pied du sapin le 24 décembre et constate avec effroi que le Père Noël l’a oubliée, laissant ses chaussures vides, dérisoires devant la cheminée. Figurez-vous qu’elle m’a dit : « Tu t’es fait avoir, ce nid à poussière au sifflement horripilant vient de Chine, pas des Pyrénées. Regarde l’étiquette : ‘Fabriqué en PRC’. PRC comme Popular Republic of China, République Populaire de Chine, si tu préfères ».
Ne faisant ni une ni deux, je fonçai vers le magasin pour dire son fait au commerçant indélicat qui m’avait assuré qu’elle avait été fabriquée au coin de l’âtre, à la veillée, par une vieille dame, qui tenait le secret de fabrication de sa défunte mère qui le lui avait confié sur son lit de mort. Et qu’elle-même le tenait de sa défunte mère qui le lui avait confié sur son lit de mort. Et ainsi de suite, depuis des générations, et ce depuis le 8ème siècle, et sans aucun doute avant, mais les archives avaient été partiellement détruites par un incendie lors de la Révolution…
J’entrai donc et lui jetai à la face le coup de l’étiquette. « Mais Monsieur, vous vous fourrez le doigt dans l’œil jusqu’au coude ! » me répondit-il sans s’émouvoir. « Fabriqué en PRC, c’est au contraire la preuve que c’est bien produit entièrement en Pays Toy ! ».
« ??? » soulevai-je le sourcil.
« PRC veut dire ‘Pyrénées Résolument Centrales’, ce qui désigne à coup sûr le Pays Toy. C’est la garantie absolue pour le consommateur d’acheter un produit créé et fabriqué localement, absolument vertueux sur le plan écologique et tout et tout… ».
C’est totalement rasséréné que j’installai dès mon retour à la maison mon merveilleux souvenir en bonne place sur le buffet de notre salle à manger, où il trône, orgueil de la décoration de la pièce…
En revanche, je ne m’explique pas que les services de communication de la Vallée des Gaves ne diffusent pas cette information par tous les moyens possibles : affiches, sites internet, réseaux sociaux, spots de pub à la radio voire à la télévision…
Enfin, grâce à ce blog de Bayen, ce malencontreux oubli est réparé, et, grâce aux algorithmes de Messieurs Musk, Google et Facebook, le Monde entier saura…
Si vous n’êtes pas convaincus avec ça, je ne sais pas ce qu’il vous faut…
Et si vous êtes chanceux, vous aurez vous aussi droit à une marmotte siffleuse lundi midi…
Cet après-midi, activités à la Grange : poursuite de l’atelier pâtisserie, fabrication d’une maquette de la Grange, Land Art (cherchez dans le dico, je ne vais pas tout vous mâcher non plus…). Vingt-deux chérubins bien désinhibés (on arrive en fin de séjour) en action dans la maison, avec en prime un harmonieux fond musical de Hard Rock. C’est vous dire s’il y a de l’ambiance.
On dit : Les Incas, les Incas… Oui, bon, les Incas… Mais quand même… On peut dire ce qu’on voudra, il faut quand même reconnaître leurs mérites.
L’idée de sacrifier une quinzaine d’enfants au Dieu Soleil pour qu’il dissipe les nuages et renvoie le Dieu de la Pluie à la niche n’est pas si stupide que ça…
Mais vous savez ce que c’est : on s’y attache, à ces petites bêtes. Et par conséquent, ce projet, pour intéressant qu’il soit, est remis à une date ultérieure.
Ce soir, Alexis, le Guide qui va accompagner toute la troupe demain pour l’ultime randonnée en montagne, vient motiver les troupes où certains ne sont pas entièrement convaincus de la beauté de l’effort et de la nécessité absolue de grimper jusqu’au sommet, juste pour avoir le plaisir de redescendre.
Blague à part, ils sont tous ravis qu’il vienne raconter ses courses dans les Pyrénées et dans toutes les chaînes du globe (ou peu s’en faut).
Et pour célébrer dignement ceci, un apéro ! …
Dimanche 13 juillet
Finalement, tout s’est arrangé !
Alors qu’hier nous avions renoncé (après moult hésitations) à l’idée de sacrifier une quinzaine d’enfants au Dieu Soleil, il a dû manger autre chose et mettre au Dieu de la Pluie une fessée à Chifoumi.
Celui-ci s’est retiré dans ses terres du Yorkshire, et c’est sous un radieux ciel d’azur que nos petits Bayennais, le front altier et le pied léger, sont partis répondre à l’appel irrésistible des cimes pyrénéennes, sous la houlette bienveillante d’Alexis, notre guide préféré, et de Pierre, notre chauffeur de Capoumobile préféré.
Décidément, la semaine est placée sous le signe astrologique du Lama, ascendant Lama : c’est un petit troupeau de ces charmantes bestioles qui a accueilli les enfants durant la montée vers le Lac d’Oncet, surplombé par la silhouette attentive du guetteur d’une harde d’isards.
Avant l’invention du 4×4 et de l’hélicoptère, les bergers passaient toute l’estive dans les hauts pâturages, avec leur troupeau. Pierre à pierre, sans mortier, ils construisaient des cabanes qui leur servaient d’abri. Au pied de l’une d’elles, Alexis a fait revivre ces hommes rudes et solitaires en racontant pour nos petits randonneurs leur vie austère, libre et sauvage. Maintenant, ces bories, comme on les appelle dans le Sud de la France, perdurent au bord du chemin, témoins immobiles de ces temps anciens, refuges occasionnels d’imprudents surpris par l’orage.
Mais malgré cela, le sac à dos est pesant, le chemin grimpe dur, certains tirent la patte, et tous espèrent à chaque repli du terrain que ce fichu lac se trouve derrière.
Et soudain, il apparaît, et chacun peut, assis dans l’herbe, profiter pleinement de la vue et des couleurs somptueuses de la nature : l’eau bleue-verte, la montagne en camaïeu de vert, gris et marron, le ciel immensément bleu, dans lequel le soleil luit et dispense ses rayons chaleureux.
Le Pic du Midi de Bigorre, avec son célèbre Observatoire, domine de toute sa majesté le site. L’histoire de la construction des bâtiments, de la mise en place des télescopes, de la vie des scientifiques sur cette plate-forme qui domine toute la chaîne des montagnes et toute la plaine, de Tarbes jusqu’à Dunkerque, n’a pas de secret pour Alexis. Et, grâce à sa faconde, n’en a plus aucun pour les enfants, suspendus à ses lèvres.
Ensuite, tandis que la troupe se restaurait au bord du lac, les lamas les ont rejoints, déambulant tranquillement au milieu d’eux. Mais grâce à la balade de mardi, ce sont maintenant des animaux familiers, et personne n’ a eu peur.
Pas plus que des crapauds que l’ont peut observer, tout au bord de l’eau, avec leur chapelet d’œufs accrochés sur le dos. Néanmoins, pas de baiser pour voir s’ils se changent en Prince ou Princesse : les enfants sont farouchement républicains.
Et tandis que neuf garçons suivaient Alexis dans l’ascension du Pic de la Bonida (Vous le connaissez… Mais si. Mais si, enfin : il est situé juste en face du Pic Eupendre et du Pic de la Mirandole !), les filles et les garçons restés au bord du lac s’essayaient aux ricochets, comme l’ami Brassens :
« N’anticipons pas,
Sur la berge, en bas,
Tout contre une pile,
La belle tâchait
D’ fair’ des ricochets
D’un’ main malhabile.
Moi, dans ce temps-là,
Je n’ dis pas cela
En bombant le torse,
L’air avantageux,
J’étais à ce jeu
De première force. »
Fatigués, mais heureux de cette belle ultime journée en montagne, où ils ont même été survolés de près par un Gypaète Barbu, nos routiers et capitaines ont repris le bus réparateur pour un retour à la Grange.
Et ce soir, la tradition sera bien respectée : le dernier repas sera une horreur d’équilibre alimentaire : burger (maison, tout de même), frites, glace.
Il sera bien entendu suivi de la Boum (avec boissons et bonbons, pour parfaire le cauchemar diététique).
Tenue de soirée, maquillage, gel capillaire, sono et playlist d’enfer de rigueur…
Et voilà ! Le temps a filé vite, et le camp tire à sa fin. Merci aux enfants, qui ont été adorables, même si parfois un tantinet bruyants (au-delà de 90 décibels durant les repas, on atteint le seuil de douleur et cela peut causer des lésions irréversibles des tympans. Hein, qu’est-ce que vous dites ?). Merci à l’équipe d’animation : à Lucile pour sa rigueur, son organisation, son enthousiasme et sa disponibilité sans faille ; à Justine, toujours aux petits soins pour tous ; à Emilie, Sara et Valentino, qui ont brillamment fait oublier qu’ils n’étaient pas encore totalement titulaires du BAFA ; A Sylviane, enfin, Notre-Dame de l’Hygiène, qui s’est employée sans relâche pour que tout roule. Et je n’oublie pas tous ceux qui sont venus auparavant pour faire que la Grange soit en état pour nous accueillir (électricité, chauffe-eau, tonte, nettoyage et montage de la tente : liste non exhaustive).
Je sais, c’est comme quand on subit un générique de film ou les remerciements lors de la cérémonie des Césars : la séquence peut paraître barbante. Mais tant pis, je tenais à l’écrire, parce que ce qui fait Bayen, ce sont toutes ces générations qui viennent bénévolement, sur leur temps libre et leurs vacances, pour continuer à entretenir la flamme que Robert et Georges, les fondateurs, ont allumée il y a plus de cinquante ans…
Demain, vos chers petits vont revenir aux pénates pour vous retrouver, le cœur content. Mais Brassens, encore lui, l’a chanté mieux que je ne saurais l’écrire :
« Heureux qui, comme Ulysse,
A fait un beau voyage,
Heureux qui, comme Ulysse,
A vu cent paysages.
Et puis a retrouvé,
Après maintes traversées,
Le pays des vertes années ».
Durant ce camp, ils ont fait l’expérience de la vie en commun, avec les copains, et se sont enivrés au doux parfum de l’indépendance vis-à-vis de vous. Ils grandissent…
Mais là encore, laissons à Tonton Georges le mot de la fin :
« Par un petit matin d’été,
Quand le soleil vous chante au cœur,
Qu’elle est belle la liberté, la liberté…
Quand on est mieux ici qu’ailleurs,
Quand un ami fait le bonheur,
Qu’elle est belle la liberté, la liberté… ».